Katrin Bremermann – Haruhiko Sunagawa – Helen Vergouwen
 

Katrin Bremermann – Haruhiko Sunagawa – Helen Vergouwen

Au moment le plus fortuit, tout occupé à récurer un aquarium, Limonov, nous dit Emmanuel Carrère, fit l’expérience du nirvana bouddhiste :
« Et puis sans crier gare tout s’arrête. (…) Il est aspiré par un vide plus plein que tout ce qui au monde est plein, par une absence plus présente que tout ce qui remplit le monde de sa présence. Il n’est plus nulle part et il est totalement là. Il n’existe plus et il n’a jamais été à ce point vivant. Il n’y a plus rien, il y a tout. »

Le vide comme présence : les trois artistes réunis ici, Katrin Bremermann, Haruhiko Sunagawa et Helen Vergouwen pourraient avoir fondé leur art sur cet oxymore. Tôles, traits, géométries, couleurs, châssis… tout est manipulé, plié et organisé pour capter ce quelque chose qui n’est ni un espace, ni un objet, ni le néant.  Expressions minimalistes sans doute, étrangères à tout superflu. Œuvres-expériences, témoignages d’une disponibilité faite en soi-même. Les travaux regroupés ici ont pour sujet l’indéfinissable, le non-advenu, le lieu de nulle part

Katrin Bremermann

Katrin Bremermann

Katrin Bremermann

Katrin Bremermann

Née à Brème en Allemagne en 1965, Katrin Bremermann vit entre Berlin et Paris. Ses travaux sont très régulièrement exposés en Europe (galeries Martin Kudlek et Vidal-Berthoux) et en Amérique du Nord.

L’angle et la courbe dépassent le simple dialogue de formes. Une sorte de détonation silencieuse travaille les masses colorées qui jaillissent, s’étendent, s’étirent en filaments. Le fond, souvent nu – toile brute, toile cirée, papier- est actif lui aussi. Quelques traces qui s’y devinent, un pli, une coulure ou même rien…. Ce qui « n’a pas été voulu » semble jouer à égalité du dessin et des couleurs. Usant de raccourcis visuels, de formes et de châssis tronqués ; déformant la toile par des contraintes et des accidents, investissant s’il le faut les tranches du tableau, l’artiste porte l’œuvre à sa limite : Défiant l’instabilité et la dissolution dans le plus parfait équilibre.

Haruhiko Sunagawa, crayon et gouache sur papier, 37 x 32,5 cm

Haruhiko Sunagawa, 2004, crayon et gouache sur papier, 37 x 33 cm

Haruhiko Sunagawa, 1985, cray et gouache sur papier, 45 x 33 cm

Haruhiko Sunagawa

Né à Fukuoka au Japon en 1946, Haruhiko Sunagawa a fait des études de physique à l’Université des sciences de Tokyo, puis en 1973 de dessin et de peinture au Hammersmith Collège of Arts de Londres. Il vit et travaille à Paris. Régulièrement exposé, tant en France qu’au Japon, il fut lauréat, en 1991, du Prix Bourdelle de sculpture. Il est représenté à Paris par la galerie Denise René.

« J’engage chacun à définir ce que provoque en lui de telles œuvres. Nous n’en serions plus les témoins passifs, mais au contraire, par chacune de nos expériences, les acteurs et les découvreurs. » Il faudrait tout citer du texte lumineux de Pablo Durán Le gué de la lumière consacré au travail de Sunagawa. S’y dévoile un artiste qui, par des dessins, des pierres, du verre ou des brindilles définit « un passage, d’une rive à l’autre, du visible à l’invisible ». Avec lui, le regard se réouvre, redevient « un outil de pénétration sans précédent ».
Il faudrait tout montrer de Sunagawa, pour saisir la mesure de l’œuvre, loin de toute illustration ou de toute esthétique, et pourtant si éminemment picturale.

Helen Vergouwen, 10 x 18 x 6 cm

Helen Vergouwen

Helen Vergouwen, 37 x 37 x 33 cm

Helen Vergouwen

Née à Rucphen en Hollande en 1960, Helen Vergouwen a étudié à l’École des Beaux-Arts Sint Joost, à Breda. Elle se partage entre les Pays-Bas et la France. De nombreuses expositions jalonnent son parcours notamment, en 2017 à la galerie Kunsthandel, Hoogeloon  et Art Rotterdam ; Musée de Châteauroux en 2016 et régulièrement depuis 2006, galerie Aller-simple, Longjumeau. Des commandes publiques lui ont été attribuées par les villes de Drunen en 2009 et 2012, Longjumeau en 2016.

Les sculptures les plus récentes, en métal noir, d’Helen Vergouwen font état d’un resserrement des plans : faces et profils ne semblent plus faire qu’un. Comme jaillies de l’élan unificateur de l’artiste, ces œuvres mettent à parts égales courbes et angles, corps et silhouettes, ce qui entoure et ce qui contient. Nous chercherons moins à « faire le tour » de ces découpes et ces pliages qu’à les saisir d’un coup, dans leur simple évidence. D’autres pièces arachnéennes tant la tôle de l’acier corten s’amincit, s’étire et se courbe, sont posées là, énigmatiques. Inclinées, en appui sur le socle, que sont-elles ? Dessins en trois dimensions, sculptures, portes ouvertes vers le pur espace ? Indifférentes aux classifications, Helen Vergouwen questionne le regard et la perception, en toute liberté.

Jean-Pierre Le Bars

 

Nous remercions chaleureusement la galerie Vidal-Bertoux représentant Katrin Bremermann et la galerie Aller-simple représentant Haruhiko Sunagawa et Helen Vergouwen pour leur confiance et leur concours.