Art brut japonais
 

Akimoto KAZUHISA – Shogo KIMURA – Kaoru KOBAYASHI – Yuki MIYAGAWA – Yui MIYAMOTO – Riona MORIKAWA – Tomoko SADAGANE – Eiko SEKIGUCHI – Ryotaro SHIN – Hiriko SHIRANE – Tomomi WAKI – Naoki WATANABE – Yasumasa SUGAWARA – Kenji YOSHIKAWA

Galerie Plein-Jour – Art brut japonais

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En cet automne 2020, la galerie Plein‐jour met à l’honneur la vitalité de l’art brut japonais dans sa déclinaison la plus pop, spontanée et hautement expressive.

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Masques de catcheurs, héros et super‐héros, trains et trajets ferroviaires, portraits et foules, champs d’écritures imaginaires, broderies et peintures sur textiles… S’expriment ici, avec des matériaux d’une extrême modestie et dans l’enthousiasme d’un être au monde farouchement libre et poétique, des visions singulières de la vie japonaise et de son double : sa représentation médiatique.

Nées dans l’intimité de la chambre ou de l’atelier de pratique artistique, ces œuvres véhiculent avec une grande finesse d’observation et un sens aigu de l’instant ce qui se vit et se montre maintenant. Dans cette exposition, le monde urbain et ses signes semblent s’afficher avec d’autant plus d’allégresse que tous ces créateurs en connaissent, de par leurs handicaps, les restrictions.

Les biographies de ces artistes sont succinctes. Ils fréquentent des Centres d’accueil pour personnes en situation de handicap à Tokyo, Saitama, Kinokawa, Sendai, Higashimatsuyama, Bundo‐Uno ou Fujisawa. Ils ont rarement exposé, sinon au sein des structures qui les accueillent, et jamais en Europe, à l’exception de Yasumasa Sugawara présenté à la galerie Plein‐jour en 2019.

Ryotaro SHIN

Ryotaro SHIN

34 ans, est résident du Centre Mebukien à Bundo-Uno. Il partage son temps entre le dessin, la lecture des cartes de train, la conversation et la chanson.

Relevés de lignes ferroviaires plus ou moins imaginaires, ses œuvres recensent des connexions, des gares, des trajets secrets, échos d’harmonies synaptiques plus mystérieuses encore. La feuille est ensuite scotchée sur du carton d’emballage où figurent, tracés au large stylo feutre, des codes et des formules supplémentaires.

Yasumasa SUGAWARA

Yasumas SUGAWARA

47 ans, travaille en tant que boulanger au sein de l’association Pomamori à Tokyo. Il pratique le dessin et le chant.

Aux qualités attendues des super-héros – force et invincibilité – Yasumasa Sugawara a ajouté la grâce, celle d’un trait au rotring noir cernant son sujet tantôt par modules et circonvolutions accumulés, tantôt par grand traits, à la manière de zébrures de combats. Batman, Immortan Joe, The Expendables ou Kumootoko surgissent directement sur une feuille de papier intersidérale, témoins magiques et vivants d’une quatrième dimension familière à l’artiste.

Riona MORIKAWA

Riona MORIKAWA

23 ans, vit au sein de l’association Count 5 à Higashimatsuyama. Hormis le dessin et les trajets en voiture et en train, elle ne se connaît pas de goût ou d’activité particulière.

Bleus ou rouges, les champs textuels de Riona Morikawa charrient des signes inventés, des alignements mouvants comme des courants. Couvrant la feuille entière ou laissée en suspens, l’écriture peut à l’occasion s’étendre en all over recto-verso ou laisser place à de grands quadrillages.

Chiffres de la vie quotidienne (mois, jours, dates anniversaires, plaques d’immatriculation…) sont pour l’artiste les sources d’une inspiration joyeuse, tout comme les lignes bleues sur fond blanc des trains qu’elle aime prendre en famille, pendant les vacances.

Kenji YOSHIKAWA

Kenji YOSHIKAWA

42 ans, vit au sein de l’association Count 5 à Higashimatsuyama. Il est agent d’entretien.

Les masques de catcheurs et les portraits de célébrités de Kenji Yoshikawa frappent par leur frontalité et leurs couleurs franches. C’est en regardant les magazines et les annuaires de lutteurs qu’il s’exprime, au crayon de couleur, au feutre ou au pastel gras. Suivant le contour des personnages, il dessine ensuite le fond, à la manière d’un vortex enserrant son sujet. Pourtant, ses masques ont des allures bonhommes et, à l’immense joie de Kenji, les combats annoncés des airs de grandes fêtes populaires.

Selon sa fantaisie, il peut aussi doter de masques anonymes ou célébrités.

Akimoto KAZUHISA

Akimoto KAZUHISA

42 ans, vit au sein de l’association Count 5 à Higashimatsuyama.

Enfant, Akimoto Kazuhisa aimait regarder le travail des presses et des rotatives dans l’imprimerie dirigée par son père. Les lettres qu’il dessine aujourd’hui, alignées en longues séquences répétitives, évoquent cet univers d’encre et de machines.

C’est à main levée pourtant – les légers tremblements et les infimes irrégularités de l’ensemble en témoignent – qu’Akimoto fait ressurgir la fascination de son enfance. La nôtre est d’un autre ordre : au verso du papier, l’encre qui transparaît laisse deviner sa manière d’opérer : point par point, en laissant patiemment s’écouler la couleur, Akimoto, immobile et en silence, retrouve le monde des mots imprimés et la rumeur de ses machines.

Yui MIYAMOTO

Yui MIYAMOTO

33 ans, vit à Kinokawa, au Centre d’accueil Pozzk.

Autiste, elle a des difficultés à communiquer par la parole. Ses dessins de foules bariolées témoignent pourtant d’un esprit enjoué et plein de fantaisie. Avec beaucoup de rigueur et de clarté, Yui Miyamoto organise des regroupements de dauphins, de bonhommes en forme de poufs et de tortues motorisées qui circulent en tous sens. Organisant ce trafic éclectique et joyeux, des figures répétitives défilent comme à la parade.

Eiko SEKIGUCHI

Eiko SEKIGUCHI

67 ans, vit à Saitama, au Centre d’accueil Furawa où elle travaille comme agent d’entretien.

Eiko Sekiguchi porte son intérêt sur les fantômes, les soucoupes volantes et tout ce qui se rapporte à l’espace. Elle dessine au pastel gras des couples qui nous dévisagent.

La présence récurrente d’un sac à main tenu par la femme ou par l’homme semble situer la scène en extérieur, mais des bébés en pyjama, tantôt près des parents, tantôt placés sur eux à la manière de figures tricotées, nous laisse dans l’indécision: où sommes-nous ? Se meuvent aussi des ectoplasmes, des fantômes bouffons et des cyclopes hallucinés : dans la douceur des teintes pastel, un monde ulule, inquiétant, rigolo et psychédélique.

Tomoko SADAGANE

Tomoko SADAGANE

42 ans, elle vit au Centre d’accueil Pozzk à Kinokawa, sur l’ile de Honshü.

Tomoko Sadagane dessine au feutre des engins de travail et de transport par grands aplats synthétiques. Avec leurs articulations en taille de guêpe et leurs antennes-mandibules, ses machines peuvent évoquer des corps d’insectes. Dynamisées par une perspectives un peu chaotique, elles sont accompagnées d’une description ou d’une pensée à caractère de message :

–– Ce train est à destination d’Umeda. Chemin de fer électrique de Hanshin. –– La pierre est esprit. Faites attention à votre santé. –– Nous aurons le courage de nous reposer. Je vais lentement dans mon travail. S’il vous plait, prenez soin de vous. Je profiterai de ma vie.

Yuki MIYAGAWA

Yuki MIYAGAWA

24 ans, vit à Fujisawa. 

Yuki Miyagawa aime les voyages, surtout pour voir les trains. Du carton, de la gouache et du scotch lui suffisent pour créer d’innombrables et pimpantes locomotives. Modèles à vapeur ou à Grande Vitesse, elles reluisent de la bande adhésive dont il les entoure. Une étonnante impression de vitesse les anime.

Shogo KIMURA et Naoki WATANABE

Shogo KIMURA

En 2015, à Sendai, le centre d’accueil Tamutamu-sha inaugura un nouveau projet, “Tamutamu to meguru towaru” consistant à concevoir des vêtements en coton et en chanvre puis, à l’initiative de la photographe Ayako Nakamura, à les peindre. Les résidents s’exprimèrent très librement ainsi, cousant, collant et peignant avec beaucoup d’enthousiasme. En 2016, ils prirent la route avec une caravane pour exposer leurs créations et organiser des ateliers de création de vêtements, sur le modèle des towaru qu’ils avaient réalisés. Ouverts à tous, ces ateliers furent l’occasion de très belles rencontres et donnèrent à Naoki Watanabe, à Shogo Kimura et à tout le groupe, de grandes joies et des moments inoubliables.

Naoki WATANABE

Dans Le point subversif : La broderie et la fabrication du féminin, l’historienne de l’art Roszika Parker rappelait que « restreintes à pratiquer l’art avec une aiguille et du fil, les femmes ont néanmoins brodé un point subversif, réussissant à créer un sens qui leur était propre dans le médium même qui avait servi à leur inculquer l’effacement de soi. » La broderie est très présente dans l’Art Brut, depuis les créations médiumniques de Jeanne Tripier (1869-1944, France) jusqu’aux œuvres contemporaines en forme de sein ou de figures zen de Yumiko Kawaï.

Hiroko SHIRANE

Hiroko SHIRANE

59 ans, vit à Tokyo et travaille comme boulangère à l’association Pomamori.

Dans des compositions géométriques de type patchwork, Hiriko Shirane engendre à l’aiguille des réticulations colorées, d’infinis réseaux tridimensionnels rappelant un processus de fusion. Parfois, des boutons sont cousus en chaînes disposées orthogonalement.

Tomomi WAKI

Tomomi WAKI

38 ans, vit à Tokyo (association Pomamori).

Tomomi Waki pratique tissage et poterie. Elle aime les fleurs de cerisier, la mer et les baleines. C’est en liant des rebuts de fil et de laine à la manière des lirettes indiennes (tapis de chiffons), qu’elle s’exprime. Sanglées de fil rouge et boursoufflées parfois jusqu’à l’informe, ses concrétions conjuguent la géométrie d’une bande tissée à celle d’un nid.

Kaoru KOBAYASHI

Kobayashi KAORU

44 ans, vit à Higashimatsuyama au sein de l’association Count 5.

Passionné de publicités et de magazines anciens, Kaoru Kobayashi redonne vie aux personnages dessinés du passé, de préférence les plus effrayants. Mais Hulk, Shrek, Frankenstein et autre Dracula, dessinés au trait sur des fonds le plus souvent monochromes, ont ici quelque chose de sympathique : devant nous, les jeux pour se faire peur ressurgissent de l’enfance, bras tendus, délicieusement menaçants.

 

Nous remercions très chaleureusement, pour leur confiance, leur aide précieuse et l’extraordinaire travail mené auprès des personnes en situation de handicap qu’elles accompagnent, les équipe des Centres d’accueil suivant :

Count 5 / Groovin à Higashimatsuyama – Furawa / Groovin à Saitama – Mebukien à Bundo-Uno – Pomamori à Tokyo – Pozzk à Kinokawa – Tamutamu-sha à Sendai.